Nous avons commencé nos observations par le sud Finistère : communes de Moëlan sur mer et de Clohars Carnoët notamment au port de Doëlan et à l'ouest de celui-ci (entre Doëlan et Merrien ; criques de Portec et de Port-Bali notamment)
Que voit-on sur l'estran rocheux où devraient vivre fucus et ascophylles ? En bien des endroits le rocher nu : il n'y a plus une touffe de goémon. Voici par exemple l'estran rocheux de la crique de Porchinec, entre Portec et Port-Bali
En d'autres endroits on trouve encore des touffes d'algues, avec des thalles de quelques cm de long. En d'autres lieux, notamment dans les parties amont des estuaires, on retrouve une couverture d'algues plus fournie, voire normale. Plus l'estuaire est long et abrité, plus on va vers l'amont, plus les algues paraissent normales : le phénomène de régression des algues progresse à peu près partout de l'aval vers l'amont.
Voici 3 images de la rive droite du port de Brigneau, prises le même jour en 2006. Sur la première, en aval, il ne reste que des pelvéties (niveau supérieur) ; la seconde montre, sur le quai, quelques touffes de fucus. Sur la troisième, en amont, il reste encore des algues en quantité notable.
En d'autres endroits on trouve encore des touffes d'algues, avec des thalles de quelques cm de long. En d'autres lieux, notamment dans les parties amont des estuaires, on retrouve une couverture d'algues plus fournie, voire normale. Plus l'estuaire est long et abrité, plus on va vers l'amont, plus les algues paraissent normales : le phénomène de régression des algues progresse à peu près partout de l'aval vers l'amont.
Voici 3 images de la rive droite du port de Brigneau, prises le même jour en 2006. Sur la première, en aval, il ne reste que des pelvéties (niveau supérieur) ; la seconde montre, sur le quai, quelques touffes de fucus. Sur la troisième, en amont, il reste encore des algues en quantité notable.
Le NW du Finistère (côte des Abers semble être la zone qui résiste le mieux, pour l'instant. Mais nous n'avons pas exploré la zone récemment. Voici une photo de cet endroit prise en 2005 (vers Penn Enez, côté Landeda, rive gauche de l'Aber Wrac'h). L'alignement de la balise et des phares permet de repérer facilement l'endroit photographié. On peut prendre cet aspect de l'estran comme référence d'un peuplement normal.
Le port de Concarneau, lui-même, ne semble pas atteint par cette régression des fucus et ascophylles, comme le montre le beau peuplement d'algues brunes au pied de la ville close et en face de celle-ci C'est peut-être pourquoi le laboratoire de biologie marine de Concarneau semble ne pas se pencher sur le problème.
Côté ville close |
Côté Lanriec |
D'autres endroit de la côte de la Manche et de l'Atlantique montrent des aspects intermédiaires entre la belle prairies de l'Aber Wrach ou de Concarneau des photos ci-dessus et le désert rocailleux.
Sur la côte de la Manche, nous avons par exemple trouvé des sites intéressants :
à Trégastel
Nous avons trouvé la même situation à Brétignolles, en Vendée : Nous voyons sur ces photos 2 aspects de l'estran, prises en octobre 2005 ; il reste encore quelques beaux champs d'algues (montrant que les conditions permettent leur développement), mais de vastes zones de roches dénudées.
Toutes ces images montrent une limite nette entre la roche nue et les champs d'algues brunes, laissant supposer une régression de ceux-ci. Pour prouver cette régression, il faut examiner ce qui se passe au fil des années.
Les 2 photos suivantes montrent 2 secteurs comparables de la rive gauche de Portec :
les rochers de Portec en 1976 |
état des lieux en 1986
et en 2003 : plus une algue. Elles n'ont pas repoussé depuis.
vers 1960, les algues recouvrent tout le rocher |
vers 1980, des trous sont apparus dans la couverture algale |
en 2003, il ne reste que quelques algues, en bas de l'escalier. |
Depuis 2003, rien n'a changé : dans la plupart des cas, lorsque les algues brunes ont disparu, elles ne réapparaissent plus.
Voici un autre site, toujours à Doëlan, à des dates plus récentes et plus précises :
le même site en janvier 2007 |
en avril 2014, il n'y a plus une seule algue |
On remarquera qu'en même temps que les algues ont disparu, des huîtres se sont installées. On constate le même phénomène dans les criques de Portec et de Port-Bali. Il n'y avait jamais eu d'huîtres en ces lieux auparavant. Ce qui est d'autant plus curieux, c'est que les ostréiculteurs se plaignent d'une importante mortalité dans leurs élevages.
On remarque ce développement d'huîtres "sauvages", (crassostrea gigas), reconnue comme une espèce invasive, autour des zones ostréicoles importantes, comme en baie de Quiberon : ci-dessous l'aspect saisissant de la côte entre Port-Haliguen et la pointe du Conguel, sur la côte est de la presqu'île de Quiberon : les algues (taches brunes) ont fortement régressé et le reste due la roche est entièrement recouvert d'huîtres.
Les algues ne s'installent pas sur les coquilles d'huîtres vivantes, et le font encore moins quand les huîtres sont mortes et perdent une des valves de la coquille : l'autre valve reste collée au rocher et montre sa face interne nacrée et complètement lisse.
Alors, quelle peut être la cause de cette inquiétante disparition des Fucacées ?
On peut penser à la cueillette, notamment pour garnir les bourriches d'huîtres. En effet, on constate que celles-ci sont vendues avec ces algues qui disparaissent. Mais cela représente une consommation minime, et localisée aux environs des exploitations ostréicoles. Or, ces entreprises se trouvent au fond des rias et dans les rades, là où le problème est quasi-inexistant. De plus, la cueillette de ces algues se fait en les coupant proprement, non en les arrachant. Quant à l'activité goémonière, elle est inexistante sur la côte sud, et au contraire développée sur la côte nord-ouest de la Bretagne, là où les algues (y compris les laminaires, les plus exploitées) sont normales.
Autre hypothèse, la pollution. Mais laquelle ? pas une pollution d'origine terrestre, en tout cas : inutile d'accuser encore l'agriculture, les eaux usées ou les peintures anti-salissures des bateaux. La situation des algues, nous l'avons dit, est meilleure dans les fonds de rias et dans les ports que sur la côte tournée vers le large. On peut même se demander si la pollution ne favorise pas les algues brunes comme les algues vertes ; mais aux îles de Glénan, éloignées du continent, non cultivées et considérées comme un des endroits les plus "propres" du littoral, la régression des fucus et ascophylles commence seulement.
La houle, alors ? Les rochers relativement abrités prennent l'aspect dénudé de ceux qui sont exposés aux grandes houles d'hiver.: On a l'impression que le mode battu gagne du terrain sur le mode abrité. Mais, malgré toutes les tempêtes qui se sont succédé lors de cet hiver 2013 -2014, il n'est pas évident que les coups de mauvais temps soient devenus plus fréquents. Cet hiver vient après plusieurs années assez calmes. Il faut cependant remarquer que les algues, notamment les ascophylles, brisent les vagues : les plus exposées protègent les autres. Lorsqu'elles disparaissent, les vagues continuent leur course plus loin et s'amortissent moins. Mais cela ne peut que s'ajouter à une autre cause.
Et cette cause, en regardant de plus près, Auguste le Roux pense l'avoir trouvée : c'est le broutage par des gastéropodes : les patelles, ou berniques.
Au tout début, comme beaucoup d'habitués de l'estran, nous avons douté, pensant que ces gastéropodes, à priori inoffensifs, avaient toujours existé, en équilibre avec leur milieu. Ce que nous avons vu nous a a stupéfié : les rochers nus sont peuplés de berniques, parfois plusieurs centaines par mètre carré. A force de gratter la roche, que peuvent-elles trouver ? La famine ne serait-elle pas à l'origine de leur attirance pour les algues brunes ?
Après avoir lu l'article sur les patelles, regardons de plus près sites déjà décrits, par exemple dans les Côtes d'Armor, à Trégastel Au tout début, comme beaucoup d'habitués de l'estran, nous avons douté, pensant que ces gastéropodes, à priori inoffensifs, avaient toujours existé, en équilibre avec leur milieu. Ce que nous avons vu nous a a stupéfié : les rochers nus sont peuplés de berniques, parfois plusieurs centaines par mètre carré. A force de gratter la roche, que peuvent-elles trouver ? La famine ne serait-elle pas à l'origine de leur attirance pour les algues brunes ?
mais que peuvent-elles donc trouver à manger sur ce rocher ? |
Ou encore à Carantec :
L'image ci-dessus montre 3 patelles émergées, continuant à brouter chacune un "rameau" d'ascophylle. Elles ne sont pas collées au rocher. On peut également distinguer 4 jeunes individus, dont l'un est partiellement caché. 2 d'entre eux se sont déjà "construit" leur place, parmi les algues rouges encroûtantes.
A force d'être ainsi rongé, le thalle se détériore, des maladies l'attaquent, il reste noir même à marée haute. Peu à peu, les algues, surtout les ascophylles, prennent un aspect "en brosse" dont les éléments ne mesurent que quelques cm. Le crampon s'abime également, au point de se détacher très facilement et d'être enlevé par une vague un peu forte. Souvent aussi, l'algue est attaquée au niveau du crampon et la bernique le coupe à la base. Ci-dessous, quelques photos montrent la destruction d'une ascophylle en quelques jours (de fin novembre 2003 à début janvier 2004.
le lendemain de cette photo, il ne restait rien de l'algue |
une vue plus grossie montre les traces laissées par les radulas |
Pour connaître la suite, reportez vous à la page : Pourquoi les algues disparaissent : des berniques voraces
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